Biodiversity Metrics & ESG : intégrer la nature dans la finance durable
Alors que les investissements ESG (Environnement, Social, Gouvernance) se généralisent, la biodiversité s'impose peu à peu comme un levier clé – longtemps négligé – de la finance durable.
Face à l'effondrement du vivant, et alors que la nature constitue le socle invisible de nos économies, investisseurs, régulateurs et entreprises cherchent aujourd’hui des indicateurs concrets : les biodiversity metrics.
Dans cet article, on explore ce que sont ces métriques, leur place dans les cadres ESG, et les opportunités qu’elles offrent pour mieux aligner nos systèmes financiers avec les réalités écologiques.
C’est quoi, une biodiversity metric ?
Les biodiversity metrics sont des indicateurs quantitatifs utilisés pour évaluer l’état, l’évolution ou l’impact de la biodiversité dans un système donné — qu’il s’agisse d’une forêt, d’une chaîne d’approvisionnement, ou d’un portefeuille d’investissement.
Parmi ces indicateurs, on retrouve par exemple :
La richesse ou l’abondance en espèces
L’état des habitats ou leur fragmentation
La valeur des services écosystémiques
L’exposition au risque de perte de biodiversité (liée à l’usage des sols, à la pollution, ou au changement climatique)
Déjà utilisés dans la biologie de la conservation et l’évaluation environnementale, ces indicateurs s’intègrent de plus en plus aux rapports ESG des entreprises.
Pourquoi la biodiversité compte pour l’ESG
La nature n’est pas un simple décor : elle constitue un actif fondamental.
Entreprises et sociétés dépendent de la biodiversité pour leurs matières premières, la pollinisation, la régulation de l’eau, ou la stabilité climatique. La dégradation de ces systèmes fragilise directement les chaînes de valeur, et expose les entreprises à des risques :
Environnement (E) : La perte de biodiversité accentue l’instabilité climatique, perturbe les chaînes d’approvisionnement et entraîne des sanctions réglementaires.
Social (S) : Elle impacte les communautés locales, les peuples autochtones, et la sécurité alimentaire.
Gouvernance (G) : De plus en plus d’entreprises doivent identifier, évaluer et publier leurs risques liés à la nature, en lien avec de nouvelles normes.
Cadres et initiatives à connaître
Plusieurs référentiels structurent aujourd’hui l’intégration de la biodiversité dans la finance :
1. TNFD – Taskforce on Nature-related Financial Disclosures
Fournit des lignes directrices pour évaluer, gérer et divulguer les risques liés à la nature.
Complémentaire au TCFD (sur le climat).
2. CSRD – Corporate Sustainability Reporting Directive (UE)
La directive européenne impose la déclaration des impacts sur la biodiversité et les écosystèmes pour les grandes entreprises.
3. SBTN – Science-Based Targets for Nature
Accompagne les entreprises dans la définition d’objectifs alignés sur la science pour la biodiversité, l’eau, les terres et les océans.
4. Cadre mondial pour la biodiversité (CBD – Kunming-Montréal)
Fixe des objectifs globaux pour stopper l’érosion de la biodiversité d’ici 2030, avec une attente forte d’engagement du secteur privé.
Les défis de la mesure
Contrairement au carbone, la biodiversité est complexe, multifacette, et spécifique à chaque territoire. Les difficultés majeures incluent :
L’absence de données standards ou harmonisées
Des résultats difficilement comparables entre secteurs
Une dispersion des efforts de surveillance
Le besoin de références solides à long terme
Mais des avancées technologiques — comme l’imagerie satellite, l’IA ou le barcoding ADN — rendent les données plus accessibles et précises.
Comment utiliser concrètement ces métriques
Les biodiversity metrics trouvent des applications directes dans plusieurs domaines :
Évaluation des chaînes d’approvisionnement (ex. : achats sans déforestation)
Analyse de portefeuille (exposition à des secteurs à fort impact comme l’extraction ou l’huile de palme)
Émission d’obligations vertes ou de prêts indexés sur des KPI biodiversité
Suivi écologique de sites grâce à des outils comme les capteurs acoustiques, les pièges photographiques, ou des logiciels comme Ecoteka
Conclusion : la biodiversité comme pilier de la finance durable
La mesure de la biodiversité est un passage obligé pour intégrer réellement la nature aux stratégies ESG.
Bien que ce champ évolue encore, les entreprises qui s’en emparent dès maintenant prennent une longueur d’avance — en anticipant les exigences futures et en contribuant activement à la résilience de notre planète.
Intégrer la biodiversité dans la finance, ce n’est pas seulement protéger la nature : c’est faire preuve d’intelligence stratégique.